Bannir le caviar noir pour sauver l’esturgeon

Si les États de la mer Caspienne réfléchissent officiellement à la mise en place d’un moratoire, les autorités ferment les yeux sur la pêche illégale et la contrebande de caviar noir.

Par GVadmin Modifié le 24 juillet 2012 à 16 h 26

Si les États de la mer Caspienne, principal lieu d'habitat des esturgeons, réfléchissent officiellement à la mise en place d'un moratoire sur le "poisson roi ", les autorités ferment les yeux sur la pêche illégale et la contrebande de caviar noir.

Depuis plusieurs années, la Russie a interdit l'exportation de caviar noir. © Dzianis Miraniuk

Depuis début mars, les exportations de caviar noir sont illégales. La période de validité des quotas de l'an dernier a pris fin le 28 février 2011.Et comme aucun des pays de premier plan dans la production d'esturgeon n'a envoyé les données nécessaires au CITES (Convention sur le commerce international des espèces menacées de la faune et de flore), l'organisation a en conséquence adopté un quota zéro.

Comme l'ont expliqué les experts de l'organisme de contrôle, les pays bordant la mer Caspienne (première réserve du monde en esturgeon) peuvent encore envoyer leurs suggestions. La taille des quotas pourra être révisée mais cela prendra du temps. Toutefois, aucun des pays exportateurs ne s'est empressé de le faire, car très peu d'esturgeons pour l'exportation ont été produits en 2010, bien que des quotas d'environ 81 tonnes avaient été attribués cette année là.

Ainsi, lors d'un sommet à Bakou en Novembre 2010 sur l'initiative du président kazakh Noursoultan Nazarbaïev, les chefs des cinq États de la Caspienne – la Russie, le Kazakhstan, l'Azerbaïdjan, le Turkménistan et l'Iran - ont approuvé un moratoire de cinq ans sur la pêche commerciale de l'esturgeon. La raison ? Une forte diminution des stocks de poissons, principalement en raison du braconnage et la pollution. Pour autant, le mécanisme du moratoire n'a pas fonctionné : à la mi-février de cette année, la version préalable a été refusé par le Turkménistan, rejoint peu de temps après par l'Iran.

Un moratoire nécessaire

Si le moratoire de cinq ans doit s'imposer, c'est pour donner à la population d'esturgeons la possibilité de souffler. 90% de l'esturgeon dans le monde est concentré dans la mer Caspienne et dans le cours inférieur de la Volga. Cette région est riche en poissons, et historiquement, la pêche à l'esturgeon y a toujours été très intense. Dans les bons moments, l'Union soviétique a exporté jusqu'à 2.500 tonnes de caviar noir uniquement. Mais l'industrialisation et le braconnage sans merci ont sapé la population de l'esturgeon.

Si la pêche s'est depuis ralentie, la contrebande a toujours de beaux jours devant elle. Dans chacun des états bordant la mer Caspienne, le contrôle de la pêche du "poisson royal" a échoué. L'année dernière, le total des prises d'esturgeons dans la mer Caspienne devait être inférieur à mille tonnes. Toutefois, selon les experts, ces mesures sont de simples effets d'annonce car en réalité, la surveillance est inexistante. Dans la pratique, on peut sur tout le littoral, sous le nom de "pêcheur de sardines", attraper l'esturgeon et récolter le caviar.

L'exemple russe

La Fédération de Russie, depuis plusieurs années, ne mène plus officiellement de pêche dans la mer Caspienne et en 2002, elle a interdit l'exportation de caviar noir. Sur le marché intérieur, il est possible de vendre neuf tonnes seulement de ce met délicat. Les autorités russes mettent également au point une nouvelle loi durcissant les sanctions pour les braconniers. Dans ce document, la pêche illégale est assimilée au crime de trafic de drogue. Pour compenser l'esturgeon de la Caspienne, se sont montées dans le sud de la Russie des exploitations piscicoles, qui seront bientôt en mesure de produire jusqu'à 15 tonnes de caviar par an. Les Russes espèrent que cette manière nouvelle de produire des œufs de poisson leur permettra de commercialiser plus d' "or noir" et de le vendre sur les marchés nationaux et étrangers.

Un met de luxe

Sur le marché mondial, le prix du caviar varie entre 1.000 et 5.000 dollars par kilogramme, et c'est encore plus cher dans les restaurants chics des capitales mondiales. Selon les experts, un moratoire en mer Caspienne, le principal habitat des esturgeons dans le monde, est la seule chance de sauver le précieux poisson. Pendant ce temps, dans les villes le long de la côte, des milliers de personnes impliquées dans le marché noir gagnent leur vie en pratiquant une pêche illégale.

Aucun commentaire à «Bannir le caviar noir pour sauver l’esturgeon»

Laisser un commentaire

* Champs requis

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.