Quand les Amérindiens payent le prix de la hausse de l’or

Le constat est simple : la tendance de forte hausse des cours de l’or provoque une nouvelle ruée qui se fait au mépris des règles en vigueur sur la protection des terres indigènes.

Par GVadmin Modifié le 27 février 2012 à 16 h 03
Indien yanomami. © lubrio (Flickr.com)

Le constat est simple : la tendance de forte hausse des cours de l’or provoque une nouvelle ruée qui se fait au mépris des règles en vigueur sur la protection des terres indigènes.

Le phénomène est en train de se produire sur les terres des indiens Yanomami, à Roraima, une gigantesque réserve que l'on ne peut pénétrer qu’avec une autorisation.
Dans les années 80, cette région avait déjà été envahie par les chercheurs d’or. On estimait à 40 000 le nombre de personnes ayant essayé d’y faire fortune du jour au lendemain.

Leur proximité avec les tribus avait provoqué une tragédie. Privés d’immunité physiologique contre les maladies amenées par les Blancs, les Indiens mourraient, même en attrapant une simple grippe. "A certains endroits 30% de la population a péri. Certains villages ont tout simplement disparu", relate le missionnaire catholique Carlos Zacchini, qui travaille dans la région. Expulsés dans les années 90, les chercheurs d’or sont de retour aujourd’hui.

Sur les bords du fleuve Couto Magalhães, la première embarcation de trafiquants se trouve à dix minutes de bateau d’un village indigène. Elle est occupée par trois hommes qui disent ne pas savoir qui est ce propriétaire à qui ils reversent pourtant 60% du fruit de leur activité.

Porteurs de maladies

Analphabètes, sans formation professionnelle, pères de famille, ils n’imaginent pas s’arrêter de travailler même en sachant pertinemment que leur activité est illégale.
“Je n’ai pas de profession. J’en ai vraiment besoin”, se justifie Franco de Lemos. Son collègue Charles plonge avec un équipement rudimentaire pour gratter le fond du fleuve. Le risque est énorme et la fatigue insupportable quand il s'agit de sessions de plongées de plus de trois heures de rang.

La présence de ces étrangers révolte les Indiens. Brandissant une machette, Joana Yanomami crie que ces chercheurs d’or ont tué ces grands-parents et qu’ils sont de retour aujourd’hui pour ramener encore plus de maladies. Au centre d’assistance médicale indigène de Boa Vista, 53 Indiens sont déjà internés, certainement contaminés par des maladies apportées par les Blancs.

En début d’année, le docteur Rosimary Queirós a relevé 23 décès dus à la malaria. Pour elle, il ne fait aucun doute que le moustique de la malaria a piqué des trafiquants qui ont, à leur tour, contaminé des Indiens. Ces 23 morts représentent plus de 10% de la population d’un même village de 210 âmes.

Atterrissages clandestins

Il y aurait actuellement 110 pistes d’atterrissage clandestines dans la réserve Yanomami. Des dizaines de machines d’extraction draguent les talus des fleuves, formant d’énormes clairières au milieu de la forêt. Certaines ont déjà été désactivées plusieurs fois par la police fédérale. Mais les chercheurs reviennent toujours.
 L’anthropologue Michel Ibris donne son avis :

Il faut s’attaquer à la logistique de l’extraction, parce que les pauvres gens qui travaillent sur ces embarcations sont tout aussi victimes que les Indiens : ils sont exploités, en régime de semi-esclavage. Ceux qui gagnent de l’argent sont en ville, loin d’ici.

Détruire les pistes d’atterrissage ne résout pas le problème, car elles sont refaites en 15 jours à peine. Mais la destruction des équipements, elle, est beaucoup plus efficace. Le pilote d’avion Ildefonso Lopes affirme avoir déjà conduit des milliers de chercheurs d’or. Pour lui, l’activité est extrêmement rentable : “Dans cette région, le propriétaire d’un avion qui coûte 150 000 R$ [62 000 euros] facture 60 à 70 000 R$ de vols par mois.”

Les yeux grands fermés

L’immensité du territoire rend les contrôles difficiles. Et quand les trafiquants sont pris, ils sont rarement condamnés.
“La législation pénale est très clémente avec les chercheurs d’or", affirme le procureur de la République de Roraima, Rodrigo da Costa.

Malheureusement, si le commerce est officiellement interdit, l’or des terres indigènes continue de circuler et est vendu librement à Boa Vista. Une avenue entière de son centre-ville est connue comme la “rue de l’or”. On y compte pas moins de 40 boutiques dûment enregistrées au syndicat des bijoutiers de la ville. Le commerce est fait à la lumière du jour, sans que personne ne s’en cache.

Un projet de loi réglementant l’extraction minière sur les terres indigènes circule au Congrès. Le leader yanomami, Davi Kopenawa, connu en Europe comme le “Dalai Lama de la forêt”, y est radicalement opposé :

On extermine la forêt, on extermine les Indiens, et après, la nature va se battre contre vous. Beaucoup de pluie et de chaleur. Voilà ce qui vous attend.

globo.com

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