Faut-il laisser les étrangers s’accaparer les terres agricoles?

La concentration des terres et les acquisitions massives de la part d’investisseurs étrangers inquiètent la FAO, qui relève des anomalies dans 17 pays d’Amérique latine et des Caraïbes. Quelles conséquences pour la sécurité alimentaire et l’agriculture familiale?

Par GVadmin Modifié le 24 juillet 2012 à 15 h 46
Terres agricoles. © Laboratorio en Movimiento (Flickr.com)

La concentration des terres et les acquisitions massives de la part d’investisseurs étrangers inquiètent la FAO, qui relève des anomalies dans 17 pays d’Amérique latine et des Caraïbes. Quelles conséquences pour la sécurité alimentaire et l’agriculture familiale?

Qui possède les terres d’Amérique latine ? L’Organisation des Nations unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) s’est posé la question et a analysé la situation de 17 pays de la région (Mexique, Costa Rica, Guatemala, Nicaragua, Panama, Argentine,  Bolivie, Brésil, Chili, Colombie, Équateur, Paraguay, Pérou, Uruguay, République dominicaine, Trinidad et Tobago, Guyana).

Depuis quelques années, les ventes d’importants domaines terriens à des étrangers ne passent plus inaperçues et 40 organisations réunies sous la houlette de la Coalition internationale des terres (CIT) ont décidé de s’intéresser à ces pratiques dans les pays émergents. Contre toute attente, le rapport de la CIT révèle que les élites nationales jouent un rôle beaucoup plus important que les investisseurs étrangers dans les acquisitions et que la production de denrées alimentaires est rarement l’objectif des acheteurs.

Progression des biocarburants

Sur les 71 millions d’hectares observés ayant fait l’objet de transactions, 22% concernaient l’industrie minière, tandis que les trois-quarts du reste étaient destinés aux biocarburants. Inspiré d’une étude antérieure réalisée en Afrique, le rapport de la FAO note pour sa part que c’est en Argentine et au Brésil que ces tendances sont les plus marquées. Fernando Egure, directeur du Centre péruvien d’études sociales, et dont les travaux sont cités dans le rapport de la FAO, estime :

L’importante concentration des terres qui caractérise l’Amérique latine est un héritage colonial.

Les latifundiaires ont disparu, mais ils ont cédé la place à des entreprise modernes se consacrant le plus souvent à l’exportation ou à la production de biocarburants, avec une présence variable de capitaux étrangers. Ce constat inquiète la FAO, qui rappelle aux gouvernements de la région qu’il est de leur responsabilité de garantir que ces processus de concentration et de dénationalisation des terres ne mettent pas en péril la sécurité alimentaire, l’emploi agricole et le développement de l’agriculture rurale.

La Patagonie attire les stars

C’est en Argentine que les ventes de terres à des étrangers ont le plus souvent défrayé la chronique, notamment dans le sud du pays. Dans les années 90, l’entreprise Benetton, le magnat des finances Ted Turner ou encore les acteurs Sylvester Stallone et Tommy Lee Jones ont fait parler d’eux en achetant de vastes propriétés en Patagonie. Mais pour Nieves Pascuzzi, de la Société rurale argentine, ces opérations n’ont pas de conséquences sur la production alimentaire :

Tout le monde parle de Benetton parce qu’ils possèdent 300 000 hectares, mais 300 000 hectares en Patagonie n’ont pas la même productivité que dans la pampa […] Les sols de Patagonie ne sont pas très propices à l’agriculture, aujourd’hui on y fait surtout de la production ovine, de la laine.

S’il n’existe pas de données précises concernant les ventes de terre à des étrangers en Argentine, l'ampleur du phénomène a tout de même fini par inquiéter le gouvernement. Une interdiction pure et simple de ce type de transaction n’est pas à l’ordre du jour, mais le parlement étudie une proposition de loi qui pourrait limiter ces pratiques.

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