Africains, la solution au développement durable est dans nos poubelles

Pour impulser une croissance verte inclusive et stimuler la création des milliers d’emplois verts nécessaires à l’insertion professionnelle du demi-milliard d’âmes que constitue la jeunesse africaine, orientons nos analyses et prospectives sur le contenu et le volume de nos poubelles.

Par melanie.mangold Modifié le 9 novembre 2012 à 17 h 12

Lançons la conquête de l’or vert pour que les déchets passent du problème à la solution !

Pour impulser une croissance verte inclusive et stimuler la création des milliers d’emplois verts nécessaires à l’insertion professionnelle du demi-milliard d’âmes que constitue la jeunesse africaine, orientons nos analyses et prospectives sur le contenu et le volume de nos poubelles. Telle serait l’une des pistes de réflexion de la deuxième édition du forum international des pionniers de la RSE et de la croissance verte inclusive en Afrique que la Confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie et l’Institut Afrique RSE organisent le 21 et 22 novembre 2012 à Tunis.

En effet, la première journée sera consacrée aux stratégies de croissance verte inclusive pour la réduction de la pauvreté et opportunités de green business en Afrique. Selon le rapport What a Waste : A Global Review of Solid Waste Management, l’Afrique Subsaharienne et MENA (Moyen-Orient Afrique du Nord) représentent respectivement 5 et 6 % de la production mondiale des déchets solides dans le monde. Par jour l’Afrique Subsaharienne produit environ 169 119 tonnes de déchets et MENA 173 545 tonnes.

Mais en 2025 la population urbaine sera de 518 millions d’habitants avec une production de déchets qui passera à 0,85 kg par personne. Ce qui donne un total journalier de 441 840 tonnes de déchets. Pour MENA la production annuelle va passer de 1,1 kg/personne/jour à 1,43 pour un total de 369 320 tonnes / jour pour les 257 millions de personnes en zone urbaine en 2025. La prise en compte des résidus urbains très en amont des politiques publiques de planification urbaine et de développement durable du territoire est particulièrement intéressante en Afrique pour plusieurs raisons.

La première est financière. L’élimination des déchets, basée principalement sur la mise en décharge, représente généralement l’un des postes budgétaires les plus importants pour les collectivités territoriales africaines. Or la mise en place de filières de tri sélectif et de valorisation est économique plus rentable à moyen terme. La deuxième est industrielle. La gestion durable des déchets présente plusieurs opportunités de création d’éco-entreprises de collecte et de recyclage. Ce qui offre des possibilités d’insertion sociale aux jeunes africains (les 15-24) dont la population va passer de 133 millions de personnes au début du siècle à 246 millions en 2020. Et comme le rappelle le Bureau International du Travail, les emplois verts doivent être décents. Plusieurs milliers d’africains travaillent déjà dans le secteur informel de l’élimination des déchets. Il est donc important de formaliser ce secteur d’activité.

Une quatrième raison est l’orientation du modèle d’industrialisation de l’Afrique. Dans une stratégie globale, la limitation de la quantité de déchets, renvoie au mode de production et de fabrication des biens et services. La réduction à la source pousse à l’innovation et au recours à certains notions nouvelles comme l’économie circulaire, l’éco-conception, l’économie de la fonctionnalité et l’écologie industrielle. De plus les flux et la nature de déchets sont des indicateurs des modes de consommation.

La cinquième raison est la production d’énergie. Selon le rapport de la Banque Mondiale, la poubelle africaine est composée majoritairement de déchets organiques (57 % en Afrique Subsaharienne et 61 % en MENA). Il y a donc des opportunités pour la production d’énergie pour la cuisson ou pour soulager le réseau électrique des villes souvent confronté à des délestages réguliers. Enfin le couplage santé - environnement est très fort sur le continent. Une gestion efficace des déchets permettra non seulement de limiter les pollutions mais favorisera aussi l’amélioration du cadre de vie et la situation sanitaire. La plupart des décès en Afrique sont causés par les maladies vectorielles (paludisme, fièvre jaune, etc.) dont la prolifération est fonction de la salubrité urbaine.

Une attention particulière devrait également être portée aux Déchets d’Équipements Électriques Électroniques (DEEE). D’après le rapport de l’ONU, DEEE ? Où en sommes-nous en Afrique la consommation intérieure est à l’origine de la majorité (jusqu’à 85 %) des DEEE en Afrique de l’Ouest. L’ONU a focalisé son analyse sur cinq pays : Bénin, Côte d’Ivoire, Ghana, Libéria et Nigeria. Il en ressort que 650 000 à 1 000 000 de tonnes de déchets électroniques issus de la consommation intérieure sont produits chaque année et doivent être gérés afin de protéger la santé et l’environnement de la région.

Au final la gestion des déchets est un indicateur de performance des politiques publiques des gouvernements locaux. D’après la Banque Mondiale:

« une ville qui ne parvient pas à gérer efficacement ses déchets est rarement capable de gérer des services plus complexes, comme la santé, l’éducation ou les transports. L’amélioration de cet aspect est l’un des moyens les plus efficaces de renforcer la gestion municipale dans son ensemble ».

Pour trouver les solutions durables au développement de l’Afrique et enclencher une dynamique de croissance verte inclusive, fouillons dans nos poubelles.

Thierry Téné

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