La compensation carbone: plus qu’une histoire de chiffres, une affaire de solidarité !

La neutralité carbone est une histoire de chiffres, de quantité : j’émets 100 tonnes de CO2, je compense 100 tonnes et je suis neutre en carbone. Bienvenue au paradis ! Et pourtant de nombreuses données démontrent qu’il est urgent d’amorcer une transition vers un monde plus responsable vis-à-vis de nos émissions de carbone.

Par melanie.mangold Modifié le 19 décembre 2012 à 17 h 16

La neutralité carbone est une histoire de chiffres, de quantité : j’émets 100 tonnes de CO2, je compense 100 tonnes et je suis neutre en carbone. Bienvenue au paradis ! Et pourtant de nombreuses données démontrent qu’il est urgent d’amorcer une transition vers un monde plus responsable vis-à-vis de nos émissions de carbone.

12 / 3 / 2°C et 2100. Ce sont les seuls chiffres qui comptent pour agir.

Douze c’est ce que chaque Français émet en tonnes équivalent CO2 chaque année. Trois correspond à ce que chaque habitant de la planète devrait émettre en 2050 pour ne pas dépasser, d’ici 2100 le seuil des 2°C de réchauffement, sous peine de lourdes répercussions pour les générations futures. Ces chiffres nous donnent l’information de base pour engager une transition vers un monde plus responsable vis-à-vis de nos émissions de carbone en cherchant en priorité à les réduire à la source.

Plus qu’une histoire de chiffres, une affaire de solidarité

Mais avant d’être une succession de chiffres, la compensation carbone est surtout synonyme de solidarité envers les populations les plus vulnérables. Il y a 15 ans, le protocole de Kyoto voyait les pays industrialisés reconnaitre leur responsabilité dans le dérèglement du climat. S’en sont suivit les objectifs de réduction assortis d’outils économiques pour les atteindre. Parmi cet éventail d’outils, le Mécanisme de Développement Propre – MDP – permet de financer, en dehors de son territoire, une économie de CO2 correspondant aux émissions que l’on n’a pas pu, ou pas voulu, éviter. Cette compensation carbone est souvent vue, à juste titre, comme un instrument de marché consistant à racheter une dette écologique. Si possible au meilleur prix.

L’approche réparatrice au détriment des actions de solidarité

C’est dès l’instauration de ce mécanisme de compensation que nous avons emprunté une mauvaise voie. La compensation devient dès lors synonyme d’action réparatrice au lieu d’être considérée comme un outil au service du développement, comme une démarche porteuse d’équité et de solidarité. Résultat : la plupart des projets de compensation carbone visent en premier lieu la quantité. C’est-à-dire le nombre de crédits carbone générés (1 crédit carbone = 1 tonne de CO2 évitée) en fonction de l’investissement initial. Le D de MDP passant alors au second plan.

L’approche réparatrice n’est pourtant pas la règle initiale. Et elle occulte le travail d’acteur du développement qui voit dans cet outil financier qu’est la finance carbone, un moyen de changement d’échelle des programmes engagés au plus près des populations. Pour ces associations de terrain, générer des crédits carbones n’est pas une finalité, c’est un moyen. La possibilité de multiplier le nombre de bénéficiaires du projet et d’inscrire ce dernier dans la durée. Ce sont les marqueurs du développement (pérennité, bénéfices socio-économiques, création d’emploi, de filière économique viable…) qui donneront toute sa valeur au carbone que l’on dit social.

Ajoutons que bon nombre de ces projets de compensation mis en œuvre par des ONG bénéficient, ou ont bénéficié, de financements institutionnels (AFD, FFEM, UE, etc). Ces subventions durent rarement plus de 4 ans, la finance carbone prenant alors le relais pour pérenniser et démultiplier les bénéfices du projet.

Sortir de la course à la neutralité carbone pour viser la qualité plutôt que la quantité

La neutralité carbone est une histoire de chiffres, de quantité : j’émets 100 tonnes de CO2, je compense 100 tonnes et je suis neutre en carbone. Aujourd’hui, plus de 35 opérateurs de compensation proposent leur offre en France. CO2Solidaire estime que moins de 10% sont des ONG, historiquement spécialistes du développement au Sud. Ces organisations à but non lucratif ont pour mission première d’améliorer les conditions de vie des populations. Elles s’appuient sur la finance carbone en « produisant » elles-mêmes des crédits carbone et en décidant de leur devenir : vente à des intermédiaires ou vente directe via un portail de compensation.

Compenser avec une ONG, c’est soutenir un projet dont l’objectif n’est pas de réduire les émissions de CO2, mais bien d’améliorer les conditions de vie. Viser la qualité plutôt que la quantité, être en rapport direct avec le « producteur » du crédit carbone, maximiser la valeur du crédit carbone pour les populations locales et participer à une finance carbone plus éthique : une compensation équitable en quelques sortes !

Au demeurant, si les pays industrialisés ont bien une dette écologique envers les pays du Sud, la compensation n’est pas un moyen d’effacer cette dette. Cette approche réparatrice doit désormais laisser sa place aux valeurs de solidarité et d’équité dans la lutte contre les changements climatiques que défendent les associations de développement. Cette Solidarité climatique dépasse la dimension carbone de la compensation, elle nous propose d’endosser notre responsabilité et de nous mettre un instant à la place des populations du Sud qui demeurent les plus vulnérables face aux évolutions actuelles du climat.

Renaud Bettin

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