Interview de Julien Custot, Expert-Facilitateur du programme ‘Des aliments pour les villes’ à la FAO

Par melanie.mangold Modifié le 13 décembre 2012 à 12 h 22

Green &Vert : Pensez-vous que les jardins ouvriers, partagés, jardins dans les villes (sur le mode de l'Agriculture Urbaine et Péri-urbaine) peuvent suffirent en partie à la subsistance de certaines catégories de la population?

Julien Custot : Les jardins ouvriers contribuent à la sécurité alimentaire et nutritionnelle des populations urbaines. Ils jouent un rôle particulièrement important pour les personnes les plus fragiles tant pour la production alimentaire, la sécurité alimentaire et nutritionnelle (produits frais) et la constitution de revenus (vente de produits).
Ils jouent aussi un rôle social et d’aménagement urbain de la ville. De plus, il faut considérer que les jardins contribuent aussi fortement à l’éducation à la nutrition et aux liens avec la nature pour les jeunes et les adultes.

G&V : Comment restaurer le lien production/campagne pour nourrir les citadins?

JC : Il faut développer des stratégies locales, plus intégrées, plus globales, mettant la personne au cœur des politiques. Il faut aussi appréhender le système alimentaire et agricole dans sa globalité : il comprend la gestion des ressources naturelles : eaux, forêts mais aussi biodiversité. C’est une politique à porter par les collectivités territoriales en lien avec les acteurs locaux.

Les liens villes-campagnes, la a connexion entre consommateurs et producteurs se font par :

-la construction d’infrastructures, notamment des marchés :

-le soutien aux producteurs par des marchés publics (restaurants scolaires, hôpitaux…)

Les consommateurs ont un rôle fondamental à jouer pour orienter la production : ce sont des consom-acteurs, des citoyens-consommateurs. L’éducation à l’alimentation et à la nutrition est aussi fondamentale pour promouvoir des « régimes durables ». Les migrants – qui viennent souvent des campagnes – peuvent, par leur régime alimentaire, conforter des flux de produits, et donc des liens économiques privilégiés favorisant le développement local.

G&V : La restauration de la biodiversité permettra-t-elle de retrouver une alimentation saine dans un circuit d'approvisionnement normal sans impacter en termes de GES? On dit que le prix des engrais devrait augmenter, cela ne suffit-il pas à nous interroger sur la qualité alimentaire produite plutôt que sur la quantité?

JC : Une approche locale permet de mieux préserver la biodiversité car elle est entretenue par les petits producteurs. C’est aussi une très bonne manière de s’adapter aux conditions changeantes (changement climatique, maladies des plantes …).

G&V : Quel est le rôle de l'éducation ? Apprendre à bien se nourrir lorsque des millions de gens s'amassent dans les bidonvilles, dont certains ont un accès à l'eau et l'électricité problématique?

JC : L’éducation est une exigence pour tout être humain. L’alimentation est, comme l’eau, un besoin quotidien, une exigence non discutable, qui figure comme droit humain fondamental dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme. C’est un problème qui concerne tous les pays, riches et pauvres, comme le montre les problèmes croissants d’obésité.

Il faut éduquer les gens car sinon ils se rabattent sur des produits à faible valeur qui ont des impacts sur leur santé. L'importance des conséquences de leurs choix sur l’équilibre alimentaire et nutritionnel au sein d’une famille (« double fardeau de la malnutrition » avec en même temps l’obésité et des déficits en micronutriments) est fondamental.

G&V : Pouvez-vous nous expliquer en quoi consistent les programmes d'assistance de la FAO en nous donnant quelques exemples?

JC : Nous développons des projets opérationnels à l'échelle d'une ville avec des partenaires institutionnels, des collectivités territoriales et des ONG qui les mettent en œuvre avec les populations locales. Nous avons élaboré le projet de Dakar (cf dossier dans le cadre de la coopération ville-ville) mais aussi des projets d'urgence, en Colombie pour les migrants déplacés suite aux guerres, à Haïti, à Gaza avec un projet de développement de jardins sur les toits où les équipes travaillent avec acteurs locaux, notamment dans l'éducation à la nutrition. Un projet démarre actuellement à Antananarivo, Madagascar, là aussi sur l'éducation à la nutrition, qui replace les citoyens au cœur du projet.

Globalement les programmes sont bien perçus. Se pose le premier problème de la pérennité, par exemple lorsque les villes voudraient bien récupérer le terrain pour d’autres usages, puis le second concernant l'implication des gens; il faut une gestion avec des chefs de projets assez forts pour des suivis pérennes.

Stéphanie Vialfont

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