L’argent, le nerf de la guerre contre la pauvreté

Par melanie.mangold Modifié le 24 juillet 2012 à 15 h 47

La conceptualisation du modèle BoP n’est pas le fruit du hasard. Elle prend racine sur des expériences d’entrepreneurs sociaux réussies, comme celle de Pr. Muhammad Yunus, fondateur de la Banque Grameen au Bangladesh en 1976.

L’avènement des Institutions de microfinance

Partant du constat qu’une grande frange des Bangladais ont recours à des usuriers pour financer un mariage, accéder aux soins de santé ou mettre sur pied un petit commerce, le Pr. Yunus, prix Nobel de la paix 2006 décide de créer une institution financière destinée à offrir aux Bangladais – principalement aux femmes souvent exclues du système économique – des microcrédits. Le but étant de leur permettre de construire une activité productive génératrice de revenus, sans demander de garantie. Le pari est risqué. Mais, contre toute attente, l’initiative rencontre une franc succès. La Banque Grameen dispose aujourd’hui de près de 1 400 succursales et travaille dans plus de 50 000 villages. Elle affiche des taux de remboursement de près de 99%, dégage des bénéfices et n’a pas eu recours aux dons depuis 1995.

© FAO/Giampiero Diana

En quelques décennies, sous l’impulsion d’ONG, d’associations, de coopératives d’épargne-crédit, etc, l’idée de Muhammad Yunus est reprise par plus de 10 000 organismes. Les Institutions de microfinance (IMF) se multiplient comme des petits pains ; et touchent aujourd’hui plus de 150 millions de personnes vivant principalement au Sud, mais aussi au Nord.

Les banques privées se sont aussi lancées sur ce nouveau marché depuis quelques années. La désignation par les Nations Unies de 2005 comme Année internationale de la micro-finance a vraisemblablement contribué à populariser ces services financiers destinés aux pauvres auprès de la fine fleur financière telles que HSBC, la Société Générale ou la Deutsche Bank. BNP Paribas cumule quant à elle près de 50 millions d’encours qui ont servis à financer 170 000 emprunteurs dont 87% sont des femmes; ce qui permet de faire vivre 800 000 personnes, nous informe Marie-Anne de Villepin, Chargée de Communication au département Microfinance de BNP Paribas. Active dans 8 pays,

BNP Paribas souhaite étendre ses activités de microfinance vers les plus petites institutions avec un focus sur l’Afrique, la grande laissée pour compte de la microfinance.

Fort de son succès, la microfinance surfe à présent sur la vague du web 2.0. Suite au succès de rangde.org, kiva.org, site de microcrédits en ligne,  permet aux particuliers de financer des petits entrepreneurs. A ce jour, c’est près de 2 millions de personnes dont 80% de femmes qui ont pu bénéficier des services du site.

© FAO/Sarah Elliott

Le microcrédit : un concept ancien remis au goût du jour

La microfinance n’est cependant pas un concept nouveau. Les tontines, système traditionnel regroupant des amis ou connaissances qui décident d’épargner régulièrement un montant fixe, existent depuis des siècles en Asie ou en Afrique. La différence - et elle est de taille - est que le passage du système informel au système formel, facilite la mesure de l’impact de la microfinance sur la lutte contre la pauvreté. Ce qui permet de fournir à grande échelle des preuves que les pauvres sont capables, ou non, d’épargner, de créer des activités économiques rentables avec peu de moyens, et de payer les intérêts du crédit. A ce propos, une étude menée sur les IMF boliviennes Crecer et Pro Mujer a démontré que plus de 99% des 60 000 bénéficiaires d’un prêt moyen de 200 euros ont remboursé leur crédit; ce qui a encouragé les investisseurs à poursuivre le financement des IMF.

Ce taux de remboursement laisse pantois, sauf qu’il n’a rien de bien surprenant. Au Sénégal, en Inde ou en Chine, les bons payeurs se comptent à la pelle. Ce sont ces couturières Chinoises, ces petits éleveurs de cochons Péruviens, ces restaurateurs de bonne fortune Indiens ou ces agricultrices Rwandaises. C’est aussi cette poignée d’Ivoiriennes fondatrices de la coopérative Cocovico qui ont su tisser, en quelques années, grâce au financement accordé par Oikocredit, un véritable marché florissant dans la commune de Cocody. Aujourd’hui, la coopérative compte 180 membres. Et chaque jour près de 5 000 commerçants et 10 000 clients se retrouvent dans ce lieu de commerce et de rencontres. Fort de son succès, la coopérative Cocovico a ouvert au sein du marché une crèche, un centre de santé et un dortoir pour éviter aux femmes de rentrer seules la nuit chez elles.

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