L’ambassade américaine à la rescousse du Roundup

Un câble de Wikileaks révèle comment l’ambassade des États-Unis s’est immiscée dans le débat portant sur le pesticide fabriqué par la multinationale américaine Monsanto, …

Par GVadmin Modifié le 16 juillet 2012 à 15 h 35

Un câble de Wikileaks révèle comment l’ambassade des États-Unis s’est immiscée dans le débat portant sur le pesticide fabriqué par la multinationale américaine Monsanto, dont l’innocuité pour la santé humaine est remise en cause par plusieurs études scientifiques.

Tracteur de pulvérisation de pesticides dans une exploitation agricole. © Andreja Donko

Suite à plusieurs rapports des autorités sanitaires provinciales signalant une recrudescence de cas de cancers infantiles et de malformations des nouveau-nés, la présidente argentine Cristina Fernandez de Kirchner ordonnait début 2009 au Ministère de la Santé une évaluation des risques sanitaires liés à l’utilisation du glyphosate, le principal composant du pesticide Roundup.

Ces travaux, toujours en cours à l’heure actuelle, ont été confiés à un toxicologue renommé de l’Université de Buenos Aires (UBA), Andrés Carrasco.

Le lobbying américain ne s’est pas fait attendre. Six mois plus tard, l’ambassade des États-Unis décidait de présenter des études favorables au Roundup devant la Senasa, le service sanitaire agroalimentaire argentin. Dans un câble dévoilé par Wikileaks, les fonctionnaires américains s’en prennent aux travaux de Carrasco, qualifiés de ‘scientifiquement non crédibles’.

Travaux pourtant publiés sur dix pages en août dernier dans la revue spécialisée Chemical Research in Toxicology (une référence du milieu), et comprenant toutes les données nécessaires pour être analysés par la communauté scientifique.

Mais les véritables raisons de la campagne de discréditation menée par l’ambassade américaine apparaissent clairement à la lecture du câble :

Le glyphosate est le composant actif du pesticide Roundup. Monsanto possède la principale part de marché du glyphosate en Argentine avec 40%, et sera donc la victime principale, la plus vulnérable aux attaques. […]

Le département d’Agriculture de l’ambassade a présenté à la Senasa des informations concernant des études menées sur le glyphosate, communément utilisé aux États-Unis ainsi que dans le cadre du programme d’éradication des cultures de coca du Plan Colombie.

Le câble s’abstient toutefois de mentionner les études portant sur la toxicité du glyphosate réalisées par l’Université de Caen, par la Station biologique du CNRS de Roscoff, par l’Université de Pittsburgh, par l’Université Nationale de Rosario ou encore par l'Université du Littoral, pourtant citées dans un article portant sur les travaux d'Andrés Carrasco.

Quant à l’analogie entre l’utilisation faite aux États-Unis du produit et son emploi en Colombie, la chimiste colombienne Elsa Nivia y voit une aberration totale. La scientifique explique que l’évaluation des risques en conditions d’utilisation normale n’est absolument pas applicable dans son pays, puisque les cultures de coca sont aspergées avec des produits dont la concentration est jusqu’à 26 fois supérieure à celle recommandée, et qui contiennent en outre un surfactant nommé Cosmo-Flux 411F, capable de multiplier par quatre l’action biologique du Roundup.

Les plaintes répétées du gouvernement équatorien, soucieux de protéger sa population, ont d’ailleurs obligé la Colombie à suspendre ses épandages de glyphosate à la frontière avec ce pays.

En Argentine, un rapport de la Commission Provinciale d’Investigation des Contaminants de l’Eau révélait qu’au cours des dix dernières années, dans la localité de Leonesa, les cas de cancer chez les enfants de moins de 15 ans avaient triplé, tandis que les cas de malformations chez les nouveau-nés avaient quadruplé. Une augmentation des pathologies qui correspond au développement d’immenses rizières, cultivées à grand renfort de Roundup.

Les scientifiques et les écologistes n’ont eu de cesse de dénoncer le manque de réaction flagrant de la province du Chaco face à cette menace sanitaire, que l’on comprend mieux à la lumière d’un autre câble dévoilé par Wikileaks. Celui-ci fait suite à la visite à l'ambassade américaine de Juan Ferreyra, le président de Monsanto Argentine :

Ferreyra a déclaré que Monsanto avait entamé un dialogue intéressant avec des producteurs de coton pour étendre l’utilisation du bt cotton (un coton OGM) […]

Monsanto a signé un accord de coopération avec le gouverneur du Chaco […] qui s’est montré très enthousiaste à l’idée de travailler avec Monsanto pour améliorer et développer la production locale de coton.

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