L’agonie de David Suzuki

David Suzuki devrait être un homme heureux. En tant que Saint Patron canadien du mouvement environnemental, il a participé à un changement radical dans la conscience publique sur la façon de penser et de vivre.

Par melanie.mangold Modifié le 19 juin 2012 à 17 h 52

David Suzuki devrait être un homme heureux. En tant que Saint Patron canadien du mouvement environnemental, il a participé à un changement radical dans la conscience publique sur la façon de penser et de vivre. Le mouvement environnementaliste fête ses 50 ans, il a débuté en 1962 grâce au livre de Rachel Carson, Silent Spring.  Pour autant assistons nous au triomphe de l'écologie?

David Suzuki ne croit plus à une continuation du mouvement écologique. ©environment north (Flickr)

L’évolution du mouvement écologique

A sa sortie, Silent Spring a horrifié beaucoup de monde. Il a dénoncé l’utilisation, à outrance et sans discernement, des pesticides qui exterminent les oiseaux et ravagent le monde naturel. Il est ainsi devenu rapidement l'un des livres les plus influents jamais écrits.

M. Suzuki lors d'une visite au journal The Globe and Mail explique:

«Quand ce livre est sorti, il n'existait aucun ministère de l'environnement nulle part sur la planète. »

En 2012, tous les pays développés ont désormais adopté des lois pour protéger l'air, l'eau et les habitats naturels. Aucun développement industriel, même mineur, ne peut avoir lieu sans une étude de son impact sur l'environnement. De nombreuses entreprises se sont engagées à un « triple résultat ». Ce qui signifie que leurs responsabilités sont d'ordre social et environnemental mais aussi économique. Les préoccupations environnementales ont conduit à des débats houleux sur le développement de nos ressources naturelles. Même ceux qui s'identifient comme conservateurs veulent que les industries se comportent de façon responsable.

L’écologie détournée de sa fonction première

M. Suzuki ressent cependant un sentiment de défaite amère. Lorsque certains lui disent que le mouvement écologiste arrive à sa fin, il répond : « Je suis absolument d'accord. » Le gouvernement fédéral reste hostile et les mesures en faveur de l’environnement sont en-cours de révision. Barack Obama a peut-être annulé le projet d'oléoduc Keystone (en tout cas, la partie qui traverse la frontière), mais il a également exprimé son enthousiasme pour de nouveaux forages confirmés par Sarah Palinesque.

En Europe, les gouvernements abandonnent leurs engagements pour les énergies vertes et les espoirs d'un traité climatique mondial sont éteints. En rétrospective, M. Suzuki affirme:

« Copenhague a essayé de traiter sur une chose qui n'appartient à personne (l'atmosphère) à travers les frontières et les intérêts économiques des 192 pays, bien que l'air ne s’en soucie pas. Nous avons essayé de forcer la nature dans notre ordre du jour. »

Le mouvement écologique serait-il à l’agonie ?

M. Suzuki croit que le mouvement a marché à reculons pendant les 20 dernières années:

« Nous n'avons pas vendu le bon message. »

Au lieu de soutenir que la responsabilité environnementale peut coexister avec la croissance économique, il pense que le mouvement aurait dû argumenter l’abandon total de cette quête de croissance économique:

« Nous avons pensé que si nous stoppions le barrage ou si nous arrêtions de couper à blanc, cela serait un succès. Nous n'avons pas fait face à la destruction sous-jacente, qu'était l'état d'esprit qui a attaqué la forêt ou voulu construire le barrage. »

Il y a une rupture fondamentale dans le mouvement environnemental. Entre ceux qui pensent que le développement de certains combustibles fossiles pourrait être acceptable s'il est bien géré, et ceux qui, comme M. Suzuki, ne pensent pas que la meilleure des choses est le non-développement des combustibles fossiles dans leur ensemble.

Le problème n'est pas que le mouvement écologiste n'ait pas réussi à expliquer ce message. C'est que les gens l'aient rejeté. M. Suzuki craint que les conséquences pour la planète et la race humaine soient catastrophiques.

Selon les points de vue, nous sommes soit dans une ère d’obscurité désespérée, soit à l'âge d'or du développement de l'énergie. L'ingéniosité humaine continue à trouver de nouvelles façons pour mieux exploiter les ressources de la Terre. Le déverrouillage vers de vastes nouvelles réserves d'énergie à travers le monde, y compris, un jour, de l'océan Arctique, est une révolution technologique. Rien de tout cela ne se déroulera sans risque zéro ou sans problème. Il y aura des revers, des accidents et, probablement, des catastrophes occasionnelles. Mais ce sera aussi un puits pour l'innovation, la richesse et les emplois.

Le livre Silent Spring a déclenché le mouvement écologique. ©Sterling College (Flickr)

Selon M. Suzuki, personne ne devrait plus en profiter que le Canada. Il s'agit du deuxième pétro-pays le plus grand du monde, après l'Arabie saoudite. Certains Canadiens pensent que c'est une catastrophe. Mais la plupart croit que c'est une bonne chose, à condition qu'ils s'occupent raisonnablement de l'environnement. Les ressources naturelles les aideront à se protéger contre les chocs économiques et les pertes d’emplois qui secouent le reste des pays développés. Elles vont également les aider à financer l'éducation, la retraite et les soins de santé dont ils ont besoin pour soutenir leur idée d'un État bienveillant.

Les batailles pour l'environnement sur le développement des ressources vont définir les politiques pendant longtemps. Mais les pipelines seront construits, le pétrole et le gaz couleront. Grâce au solide héritage de responsabilité environnementale, il sera possible de fixer des normes environnementales et de sécurité pour le monde.

1 commentaire on «L’agonie de David Suzuki»

  • C’est notre idole.

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