Un second journaliste assassiné à cause de sa lutte contre la déforestation illégale

Un journaliste d’investigation qui faisait des reportages sur l’exploitation illégale du bois a été retrouvé mort dans sa voiture. C’est le second journaliste assassiné par les mafias de la déforestation en 2012.

Par Aurelie Taupin Modifié le 19 septembre 2012 à 10 h 44

Un journaliste d’investigation qui faisait des reportages sur l’exploitation illégale du bois a été retrouvé mort dans sa voiture. C’est le second journaliste assassiné par les mafias de la déforestation en 2012.

Hang Serei Oudom a été retrouvé dans sa voiture, avec des traces de coups de hache dans la tête. La voiture était arrêtée dans une plantation de la province de Ratanakiri. Ses collègues du quotidien pour lequel il travaillait, le Vorakchun Khmer Daily, sont attérés. Rin Ratanak, éditeur en chef du journal, connaît les raisons de la tragédie : « ce n’est pas un vol violent qui a mal tourné. C’est un crime. Il enquêtait sur la déforestation sauvage commandée par les hauts fonctionnaires de la province. Beaucoup de ses travaux se focalisaient sur l’exploitation illégale des essences précieuses ». La disparition d’Oudom n’est malheureusement pas une grande surprise. Ses collègues lui avaient recommandé à plusieurs reprises d’abandonner ses travaux et il avait reçu des menaces de mort.

La violence pour faire taire la presse deviendrait-elle une mauvaise habitude dans le royaume ? En tous cas, Oudom est la seconde victime en quelques mois. En avril, Chhut Vuthy avait été abattu par des policiers alors qu’il refusait de détruire des photos d’activités de déforestation illégales. Ce que les criminels en col blanc espèrent sans doute, c’est que la multiplication des assassinats fasse son effet et incite la presse locale à pratiquer l’auto censure. Ainsi, la ‘mafia du bois’ pourrait tranquillement continuer ses juteuses activités.

Selon un rapport des Nations Unies, la couverture forestière au Cambodge est passée de 73% en 1990 à 57% en 2010, en grande partie à cause des activités illégales. Le modèle est bien rôdé : un cadre de l’administration fait abattre quelques centaines d’hectares, vend le bois à l’étranger puis concède un droit d’exploitation sur le terrain dégagé à des sociétés agricoles, que ce soit pour exploiter le caoutchouc ou la canne à sucre... Souvent, l’armée protège les bûcherons dans leur tâche, puisqu’ils sont susceptibles d’être ‘dérangés’ par les villageois des environs qui dépendent de la forêt pour leur subsistance. Parfois, l’armée fait encore plus de zèle : Hang Serei Oudom avait récemment révélé que le fils d’un général de l’armée faisait transporter du bois dans des camions militaires ! Tout en imposant, bien sûr, une ‘taxe’ de protection aux autres exploitants illégaux…

La mort de ces journalistes découragera-t-elle les défenseurs des forêts cambodgiennes ? Pas si sûr. Chhut Vuthy était par exemple avant sa mort, un infatigable promoteur des ‘patrouilles citoyennes’. Ces ‘unités’ constituées par les villageois qui sont les premières victimes de la déforestation subsistent. Elles harcèlent sans relâche les exploitants illégaux et brûlent les fûts d’essences rares qui attendent d’être expédiés. Selon la presse locale, cela coûte des dizaines de milliers de dollars aux mafias du bois. La seule façon de les ramener dans le droit chemin et de sauver les forêts d’Asie du sud est ?

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