Surpêche et non-respect des avis scientifiques pour les espèces profondes d’Europe

Une nouvelle étude, publiée le 29 septembre sur le site du journal Ocean & Coastal Management, révèle une gestion désastreuse des populations de poissons profonds dans les eaux européennes.

Par GVadmin Modifié le 9 novembre 2012 à 16 h 53

Une nouvelle étude, publiée le 29 septembre sur le site du journal  Ocean & Coastal Management, révèle une gestion désastreuse des populations de poissons profonds dans les eaux européennes.

Sebastian Villasante et ses co-auteurs ont analysé les recommandations scientifiques ainsi que les totaux admissibles de capture (TAC) concernant les espèces de poissons profonds entre 2002 et 2011. Ils en concluent que dans 60% des cas, les quotas fixés pour les espèces profondes sont supérieurs aux avis scientifiques, et que les captures dépassaient ensuite les quotas fixés dans 50% des cas.

« Dans les cas d’excès, les captures sont en moyenne 3,5 fois plus élevées que le quota décidé, mais parfois, elles sont jusqu’à 28 fois supérieures au quota approuvé par le Conseil de l’Europe » explique Sebastian Villasante, chercheur à l’Université de Saint-Jacques de Compostelle en Espagne.

Sustainability of deep-sea fish species under the European Union Common Fisheries Policy est la première analyse systématique de l’efficacité du régime de gestion européen pour les espèces profondes.

«Notre étude montre que le Conseil de l’Europe a peu d’estime pour les avis scientifiques et que la pêche industrielle ne respecte pas les limites fixées par l’Europe. Il n’est pas surprenant que l’exploitation des espèces profondes se trouve « en dehors des limites de sûreté biologique », comme l’a  estimé  le  Conseil  international  pour  l’exploration  de  la  mer  (CIEM) »  ajoute  l’un  des  co-auteurs, Telmo Morato, de l’Université des Açores au Portugal.

«Le problème vient en partie du fait que les pêcheries se développent bien plus rapidement que les connaissances des chercheurs et des gestionnaires des pêches”, note Henrik Österblom du Centre de Résilience de Stockholm. «La conséquence de cela est que certaines des données cruciales à propos des espèces sont réunies longtemps après que le stock s’est effondré. »

L’étude montre que la longévité moyenne des espèces capturées par les flottes européennes augmente avec la profondeur : tandis qu’en surface, les espèces ont en moyenne 13 ans, celles peuplant les eaux de profondeur intermédiaire ont 25 ans en moyenne et les espèces profondes ont 60 ans. Pêcher en profondeur mène ainsi à la capture d’espèces plus longévives et vulnérables.

Les résultats indiquent également que l’expansion bathymétrique des flottes européennes entre 1950 et 2006 est deux fois plus importante que celle des flottes mondiales. Ainsi, les navires de pêche de l’Union européenne  ont-ils augmenté de 78 mètres la profondeur moyenne de leurs opérations de pêche, tandis que dans le même lapse de temps, les flottes mondiales ne l’ont augmenté que de 42 mètres.

Cette étude montre que l’exploitation des espèces profondes pose de sérieux problèmes qui viennent s’ajouter à ceux précédemment identifiés par les chercheurs, tels que le taux très important d’espèces capturées accidentellement (environ une centaine) et la destruction de l’environnement marin par les chaluts de fond tractés en profondeur. Le non-respect des avis scientifiques et des limites autorisées de captures ne fait qu’aggraver une situation déjà préoccupante. La démonstration est univoque : les pêches profondes sont loin d’être durables et bien gérées.

« Un changement radical du régime de gestion actuelle  est nécessaire, et de façon urgente,  pour pouvoir assurer la durabilité à long terme des espèces d’eau profonde » estime Sebastian Villasante.

Cette étude paraît au moment où le règlement proposant de refondre la gestion des pêches profondes et d’interdire le chalutage profond, proposé  par  la  Commission  européenne  le  19  juillet  2012, commence à être débattu au Parlement européen.

Claire Nouvian

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