Des centrales nucléaires au pays des séismes, un risque calculé ?

Peu ébranlé par les dernières catastrophes sismiques au Japon et sur son propre territoire, le Chili remet sur le tapis ses ambitions nucléaires et annonce la reprise des études de faisabilité. Une position difficile à soutenir dans un pays dont l’histoire est jalonnée de catastrophes naturelles.

Par Octavia Tapsanji Modifié le 19 novembre 2012 à 10 h 31

Peu ébranlé par les dernières catastrophes sismiques au Japon et sur son propre territoire, le Chili remet sur le tapis ses ambitions nucléaires et annonce la reprise des études de faisabilité. Une position difficile à soutenir dans un pays dont l’histoire est jalonnée de catastrophes naturelles.

Peut-on maîtriser les risques liés à l’énergie atomique dans une région hautement sismique ?

Pour Matias Negrete-Pincetic, diplômé en ingénierie électrique et chercheur à Berkeley, la réponse est non. Comme beaucoup de Chiliens, le scientifique ne comprend pas pourquoi le gouvernement de Sebastián Piñera s’acharne à vouloir introduire la technologie nucléaire au Chili.

Alors que des nations comme l’Allemagne, la Suisse la Belgique et même le Japon s’efforcent de réduire leur dépendance au nucléaire, le Chili continue à nager à contre-courant, malgré les risques évidents que le développement de cette technologie représenterait pour le pays.

Des catastrophes naturelles majeures jalonnent en effet de manière régulière l’histoire chilienne. Le 27 février 2010, un des séismes les plus puissants jamais enregistrés, d’une magnitude de 8,8, provoquait la mort de 525 personnes et déclenchait un tsunami dans le Pacifique Sud.

Les centrales : trop complexes et pas assez robustes

Ces évènements, suivis peu de temps après par la catastrophe japonaise de Fukushima, n’ont pas suffi à dissuader les partisans du nucléaire, qui pensent toujours qu’une analyse de risque correctement menée permettrait d’exploiter cette énergie en toute sécurité.

Mais si des désastres de l’ampleur de Fukushima n’ont pas lieu tous les jours, les centrales atomiques n’en restent pas moins des systèmes complexes et peu robustes, vulnérables à des séismes plus faibles.

Il y a quelques années, un tremblement de terre de magnitude 6,6 avait suffisamment endommagé une centrale japonaise pour la rendre inutilisable pendant près de deux ans. Quelles seraient les répercussions sur l’approvisionnement en électricité d’un petit pays comme le Chili si l'une de ses principales sources d'énergie se retrouvait paralysée pendant un tel laps de temps ?

L’abandon des énergies renouvelables

Selon Matias Negrete-Pincetic, la reprise des études de faisabilité du nucléaire, interrompues après la catastrophe nippone, s’ajoute à une suite de décisions regrettables concernant la politique énergétique du pays : revue à la baisse de l’objectif d’énergies renouvelables non conventionnelles pour 2020, qui passe de 20 % à 10 %, réduction du budget de l’Agence pour l’efficacité énergétique, et annonces de méga-projets hydroélectriques auxquels est farouchement opposée une grande partie de la population.

Les études montrent pourtant qu’il faudrait au contraire privilégier une génération distribuée, plus proche des centres de consommation, en particulier dans un pays peu peuplé comme le Chili, qui s’étire sur 4300 kilomètres de long. Par ailleurs, la mise en œuvre des nouvelles technologies permet aujourd’hui un contrôle en temps réel de la production, qui facilite l’intégration des énergies renouvelables.

En tant que chercheur, Matias Negrete-Pincetic regrette que les fonds alloués à la recherche sur le nucléaire ne soient pas destinés au développement des énergies vertes, alors même que le pays offre un potentiel inégalable en matière de solaire et d’hydroélectrique.

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