L’éco-conception et le recyclage au secours de l’industrie automobile ?

La performance écologique a été et reste un point clé pour le soutien de l’industrie automobile en France. Le système bonus/malus sur les émissions de CO2 des véhicules neufs mis en place en 2007 a permis de soutenir efficacement les voitures françaises, plus petites et moins gourmandes que leurs cousines étrangères.

Par Marc-Antoine Franc Publié le 20 février 2013 à 0 h 22

La performance écologique a été et reste un point clé pour le soutien de l’industrie automobile en France. Le système bonus/malus sur les émissions de CO2 des véhicules neufs mis en place en 2007 a permis de soutenir efficacement les voitures françaises, plus petites et moins gourmandes que leurs cousines étrangères. L’Etat espère les mêmes effets en appliquant la même fiscalité pour les véhicules hybrides et électriques encore moins émetteurs en gaz à effet de serre. De quoi favoriser l’émergence de la Renault Zoé électrique et soutenir la stratégie hybride de Peugeot.

Beaucoup d’incertitudes planent encore sur ce dispositif qui pourra favoriser aussi (et surtout ?) les véhicules étrangers importés. Nombreux seront les constructeurs étrangers à la pointe en matière de technologies hybrides ou électriques comme Honda ou Toyota à bénéficier également de cette manne. De la même manière que les tarifs de rachat d’électricité d’EDF favorisent d’abord l’importation de panneaux solaires chinois, la fiscalité verte sur nos véhicules favorisera-t-elle en priorité les constructeurs étrangers ? Le temps est peut-être venu de repenser les aides pour favoriser les véhicules écologiques (c’est l’avenir) mais aussi l’industrie locale.

Valoriser la matière et l’industrie locale

Au-delà des intentions louables du Plan Automobile à ce sujet, l’éco-conception et le recyclage sont les grands laissés pour compte des mécanismes d’incitation alors que ces domaines sont à même de redonner de la compétitivité à l’industrie en lien fort avec le territoire. La construction du véhicule et la gestion de sa fin de vie pèsent en effet de plus en plus lourd d’un point de vue économique pour l’industrie et du point de vue écologique pour la planète.

Du point de vue économique d’abord. Les matières premières et les équipements pèsent plus de 60 % du coût de revient d’une voiture. La hausse du cours des matières fait que les constructeurs et sous-traitants ont intérêt à investir dans les technologies de recyclage. Augmenter l’usage de matériaux recyclés, sécuriser les gisements de matières premières secondaires en filières courtes, permettront de réduire les coûts de production et la dépendance aux fluctuations des cours. Au-delà du débat sans fin autour du coût de la main d’œuvre, la matière première doit être considérée comme le levier central pour réduire les coûts de production et améliorer la compétitivité.

Sous l’angle écologique ensuite. Les étapes de construction et de fin de vie pèsent d’autant plus lourds dans le cycle de vie de la voiture que les impacts liés à son utilisation diminuent (meilleure efficacité des moteurs, hybridation, allègement des véhicules, etc.). Ce constat est d’autant plus vrai pour les véhicules électriques dont l’usage ne représente plus « que » 15% environ du bilan carbone (en France compte tenu du faible contenu en CO2 de notre électricité). Quatre-vingt-cinq pour cent du bilan environnemental d’une voiture sont désormais liés à l’énergie et aux matériaux nécessaires pour sa construction et à sa fin de vie, batteries comprises.

Origine et fin de vie garantie, selon quels dispositifs de soutien ?

Le principe de Responsabilité Elargie du Producteur (REP) existe en France pour l’automobile et incite les constructeurs à financer les recycleurs pour assurer la reprise et le démantèlement des véhicules. Mais ce dispositif est insuffisant. La France a déjà été condamnée en 2010 par l’Union européenne pour non atteinte de ses objectifs de recyclage pour les véhicules usagés.

Pour dynamiser l’industrie, ce principe de REP doit être étendu pour intégrer des incitations en matière d’éco-conception, démontabilité, part des matériaux recyclés et recyclables, etc. Des clauses de proximité mettraient le pied à l’étrier des équipementiers français qui s’approvisionnent localement.

La REP doit également évoluer pour favoriser les constructeurs pouvant garantir la reprise directe des véhicules à travers notamment leur réseau de distribution, en vue d’un recyclage efficace et local. Une véritable barrière à l’entrée pour les constructeurs étrangers qui n’auraient pas pignon sur rue. La REP sur les appareils électroménagers et électroniques (DEEE) joue déjà ce rôle sur un tout autre secteur. Elle contraint les distributeurs d’assurer la reprise des équipements usagés notamment en magasin, et empêche du coup les fabricants étrangers d’inonder le marché avec des produits distribués via internet à bas coûts.

Ces dispositifs permettraient de créer un formidable appel d’air pour l’industrie du recyclage qui peine aujourd’hui à se développer en France faute d’investissements suffisants. Plus de 80 % des plastiques, caoutchoucs, pneus, mousses, issus du recyclage automobile sont encore enfouis ou incinérés. Quinze pour cent des carcasses sont envoyées hors de nos frontières (en grande partie en Espagne). Les marges de progrès sont importantes.

Marc-Antoine Franc

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