La Patagonie, nouvel eldorado du gaz de schiste

Disposant de la troisième réserve mondiale d’hydrocarbures non conventionnels, l’Argentine se lance dans la fracture hydraulique, sans scrupule pour l’eau potable des Indiens Mapuche. Mais face à la menace que représentent ces techniques pour l’environnement et la population locale, la résistance s’organise.

Par Mathieu Viviani Modifié le 7 juin 2013 à 11 h 17

Disposant de la troisième réserve mondiale d’hydrocarbures non conventionnels, l’Argentine se lance dans la fracture hydraulique, sans scrupule pour l’eau potable des Indiens Mapuche. Mais face à la menace que représentent ces techniques pour l’environnement et la population locale, la résistance s’organise.

© Stanley Howe

Le pétrole pur se fait rare

À l’heure où les gisements offrant des hydrocarbures à un état plus ou moins pur se font rares, les compagnies pétrolières se tournent vers des sources « non conventionnelles », tels que les sables bitumineux et le gaz de schiste.

Complexes et coûteuses, les nouvelles techniques d’extraction présentent aussi plus de dangers pour l’environnement. Pour libérer le gaz de schiste des roches compactes où il est emprisonné, il est en effet nécessaire d’injecter un mélange d’eau et de produits chimiques dans des puits horizontaux, dont la longueur atteint parfois plusieurs kilomètres.

Ces méthodes sont déjà employées en Amérique du Nord, où elles suscitent une vive polémique, et sont interdites en France et en Bulgarie.

Les populations autochtones ne sont pas consultées

En Argentine, l’engouement pour cette technique ne rencontre aucune opposition de la part du gouvernement. Car le potentiel du pays est alléchant : selon un rapport publié récemment par la compagnie pétrolière nationale YPF, le sous-sol abrite la troisième réserve mondiale de gaz de schiste, juste derrière la Chine et les États-Unis. Dès 2008, la compagnie américaine Apache a obtenu le droit de mettre en place une plateforme de fracture hydraulique sur les terres des Mapuche, sans leur accord préalable.

Aujourd’hui, leurs maisons sont encerclées par les puits de forage et les habitants de la région craignent que l’exploitation d’hydrocarbure ne pollue l’aquifère Zapala, principale réserve d’eau douce de la région.« Aux morts d’animaux, qui avaient déjà lieu avec l’exploitation conventionnelle, s’ajoute aujourd’hui la menace pour la santé de la population, car ils brûlent du gaz ici, tout près des habitations », dénonce Leftraru Nawel, de la Confédération Mapuche.

Alors que l’eau potable se fait rare et que les communautés sont désormais approvisionnées par bidons, l’entreprise Apache utilise des millions de litres d’eau pour la fracture hydraulique.

Aucun traitement des résidus n’est prévu

« Le problème, ce n’est pas seulement la quantité d’eau utilisée, dont nous ignorons la provenance, c’est aussi le fait qu’ils y ajoutent des produits chimiques inconnus, car ces informations sont protégées par des brevets », ajoute l’activiste. Aux États-Unis, cette eau résiduelle est réinjectée dans des puits inutilisés, sans aucun retraitement, et la Patagonie argentine ne dispose pas non plus de technique de neutralisation de ces déchets.

Malgré les actions en justice dénonçant des irrégularités dans les études préliminaires d’impact environnemental et l’absence de consultation des communautés locales, les projets continuent et pourraient même gagner de nouveaux territoires. Dans la province de Salta, située au pied des Andes, et celle d’Entre Ríos, à la frontière de l’Uruguay, de nouveaux gisements attirent la convoitise des grandes compagnies. Dans ces régions traditionnellement consacrées à l’agriculture, les troupeaux de vaches risquent de céder bientôt la place à des puits de pétrole.

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