Consommation collaborative : deux mots pour des pratiques multiples

La consommation collaborative recouvre de nombreuses pratiques marchandes et non marchandes qu’il est essentiel d’identifier pour en comprendre le sens.

Par Octavia Tapsanji Publié le 19 septembre 2013 à 0 h 25

La consommation collaborative recouvre de nombreuses pratiques marchandes et non marchandes qu’il est essentiel d’identifier pour en comprendre le sens.

©Johann H. Addick

De nombreux utilisateurs de la plateforme communautaire monECOCITY nous interpellent sur la terminologie utilisée par les acteurs de l’économie collaborative utilisant tour à tour des  mots comme : "consommation collaborative", "économie du partage, du don, de l'échange, du troc" et bien d’autres termes, qui semblent aller dans la même direction. Le vocable consommation collaborative englobe pour de nombreux auteurs tout ce qui va permettre d’optimiser la durée de vie d’un produit, son usage via différents utilisateurs, sa propriété ainsi que ses différentes formes de distribution et d’acquisition. Plus nous consommons sans chercher à posséder, plus nous partageons nos biens avec d’autres utilisateurs, plus nous développons une attitude collaborative.

monECOCITY a pris le parti de proposer à ses utilisateurs une palette large de pratiques collaboratives. Quelles soient marchandes ou non, ils pourront choisir le type de transaction collaboratif qui correspond le mieux à leurs besoins et valeurs.

A travers des exemples simples, illustrons chacune d’entre elles et tentons de les différencier pour mieux comprendre les composantes de cette économie du partage.

La consommation collaborative monétarisée

Nous pourrions dire qu’une personne propriétaire d’un bien, d’un objet uniquement pour sa propre utilisation développe une attitude « dite » individualiste. C’est le cas d’un automobiliste conduisant le plus souvent seul, ne prenant aucune personne en stop, ne pratiquant ni le co-voiturage, encore moins l’auto-partage. Il est propriétaire d’une voiture pour sa propre utilisation comme des millions de personnes. Il y a aussi ceux qui possèdent une voiture et qui pratiquent le co-voiturage. Cela leur permet à la fois de transporter des personnes tout en partageant les frais de transport. De la même manière, des automobilistes utilisant leur voiture uniquement le week-end décident de la mettre à disposition la semaine sur un site d’auto-partage. Cela rend service à un automobiliste qui va la lui louer tout en lui permettant d’en amortir l’achat. Ces deux cas de co-voiturage et d’auto-partage illustrent une pratique concrète de consommation collaborative, mettant en scène des propriétaires qui partagent leur bien moyennant une transaction financière et des utilisateurs préférant payer uniquement l’usage plutôt que de posséder le bien.

Qu’en est-il de la vente de produits d’occasion lors d'un vide-grenier ou d'un vide-dressing, tels qu'ils sont pratiqués dans nos communes ou via des sites spécialisés ? Est-ce une attitude collaborative, une posture anti-gaspillage, un moyen de récupérer de l’argent ou d’en dépenser moins ? Sans doute un peu des trois. C’est une relation de particulier à particulier, qui permet de rallonger la vie et l’usage d’un produit sans augmenter son empreinte écologique, tout en évitant la fabrication de nouveaux.

Donner une nouvelle vie à un produit dormant dans un recoin de chez soi, même en demandant une participation financière, participe à cette économie collaborative. Il existe également des échanges collaboratifs non financiers qui enrichissent la vie du collectif par la valeur des liens créés.

La consommation collaborative non marchande basée sur le partage

Il existe de nombreux modes de consommation collaborative sans monétarisation. Certaines personnes, même si elles sont aussi propriétaire d’un véhicule, favorisent le contact humain en prenant gratuitement des auto-stoppeurs. Elles développent une posture de partage comme le font les « couchsurfers » hébergeant gratuitement des voyageurs chez eux. Toujours dans cette notion de partage sans flux financier, nous trouvons de nombreuses pratiques et attitudes humaines et économiques.

Prenons l’exemple de Paul et de son voisin Eric : ce dernier a besoin d’une remorque, Paul lui prête la sienne en toute sympathie. Il pratique le prêt gratuit. Quelques jours plus tard, la voiture de Paul tombe en panne, alors qu’il a un RDV important. Eric fait un détour pour le déposer. Il fait preuve d’entraide. La maison d’Eric brûle. La famille de Paul l’héberge le temps pour lui de trouver une solution et lui donne des vêtements. Elle fait preuve de solidarité.

Paul prête à Eric sa remorque, lequel, en retour, met sa tondeuse à la disposition de Paul. Ils font un échange.

Paul offre sa remorque à une association humanitaire, il fait un don. Il échange sa remorque contre une tondeuse et pratique ainsi le troc.

Paul, Eric et leurs voisins décident ensemble d’acheter une tondeuse pour leur zone pavillonnaire ;  ils développent une attitude « dite » collectiviste et deviennent tous propriétaires de la machine.

Paul amène sa remorque, Eric sa tondeuse et Marc sa voiture, afin de tondre les différentes parcelles de jardin. Ils adoptent une posture coopérative.

La distinction entre attitude coopérative et attitude collaborative ne paraît pas si évidente que cela. Dans l’approche coopérative chacun a une tâche déterminée mais la réussite du groupe va dépendre de la manière dont les acteurs vont être capables de travailler et de coopérer ensemble pour atteindre l’objectif collectif final. Dans le collaboratif, il faut rajouter une notion de co-création collective qui permet à chacun d’interagir sur l’ensemble de l’édifice à bâtir. C’est le principe du logiciel libre ou du wiki dans lesquels chaque intervenant apporte sa réflexion et sa création. De toute manière, les deux notions sont intimement reliées. Coopérer et co-créer sont les clés de cette nouvelle économie du partage.

En conclusion, nous constatons qu’il y a un éventail d’attitudes entre individualisme et  le collectivisme. Certaines sont monétarisées, d’autres basées sur le partage et le don. Dans tous les cas, cette nouvelle posture de consommation collaborative, notamment vers plus d’usage et moins de possession, est à la fois bénéfique pour l’écologie (moins de déchets et de production de CO2), positive pour son budget en diminuant les coûts d’acquisition et participe à une plus grande solidarité.

Francis Karolewicz

1 commentaire on «Consommation collaborative : deux mots pour des pratiques multiples»

  • Ravie de partager cette analyse avec vous, pour moi il y a une 3eme catégorie néanmoins, qui est le Partage en mode éco-systèmes organisés type achata groupés ou la communauté collabore ensemble pour se substituer à un organisme professionnel …

    Je serai heureuse d’en discuter plus amplement..

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