Alors que, depuis 3 mois maintenant, le pétrole continue de s’échapper dans le Golfe du Mexique, que la Norvège vient d’annoncer l’arrêt de ses forages en eaux profondes dans la Mer du Nord, que toute …
à contre-courant du monde avec ses forages pétroliers en eaux profondes
Alors que, depuis 3 mois maintenant, le pétrole continue de s'échapper dans le Golfe du Mexique, que la Norvège vient d'annoncer l'arrêt de ses forages en eaux profondes dans la Mer du Nord, que toute l'Europe et les États-Unis reconsidèrent leurs projets d'explorations d'hydrocarbures, le Brésil annonce qu'il n'a aucune intention de suspendre voire ralentir son programme de pétrole 'pré-sel'.
Ce terme 'pré-sel' a été adopté pour désigner le pétrole enfoui entre 5 000 et 7 000 mètres sous la mer, et retenu par une couche de sel d'une épaisseur de 2 000 mètres. Les réserves de pétrole que ces gisements contiennent sont absolument gigantesques et font l'objet de vigoureux débats au Brésil afin de déterminer comment va être redistribuée cette manne de pétro-dollars.
Or le contexte mondial est à la prudence depuis le terrible accident de la plateforme de forage de BP aux États-Unis.
Pour Guenther Oettinger, commissaire européen à l'énergie,
l'industrie doit tester trois fois ses pratiques, programmes de formation et technologies. Les entreprises devront convaincre les organes régulateurs et prouver que les vérifications nécessaires auront été faites et la sécurité renforcée.
La proposition de suspension des activités en Europe permettrait d'attendre les résultats des investigations sur les causes de l'accident de BP.
Mais cette prudence n'est pas de mise au Brésil. Au contraire, la plateforme d'Espirito Santo vient de commencer officiellement sa production de pétrole 'pré-sel' découvert en décembre 2008. Selon Petrobras, le puit produira 13 000 barils de pétrole léger par jour et atteindra sa capacité maximum de 20 000 barils jour dès cette année.
Les opinions sont mitigées quant à la décision européenne de suspension temporaire des forages en eaux profondes. Les industriels brésiliens de l'énergie estiment que la situation du Brésil est différente de celle de l'Europe dans le sens où les explorations sont plus récentes. Et même si une alerte a déjà eu lieu lors de la perforation du second puit de pré-sel dans la baie de Santos*, les autorités jugent que les normes de sécurité adoptées au Brésil sont parmi les meilleures du monde. Bref, pour eux, il n'y a pas de raison de ralentir le programme.
C'est également l'avis du Président Lula qui affirme que le Brésil possède la technologie nécessaire pour explorer le pétrole en eaux profondes. Lula qui n'hésite pas à tirer à boulets rouges sur les États-Unis, 'incompétents' à ses yeux de ne pas réussir à contenir la fuite de pétrole dans le Golfe du Mexique. Quant à la décision européenne, Lula la minimise et ironise sur le soi-disant déclin des réserves européennes de pétrole, en Mer du Nord ou ailleurs. Lula fait passer un message clair, ressemblant à ceci : 'nous, au Brésil, nous avons du pétrole, nous comptons bien en profiter, et nous n'avons pas de leçon à recevoir des grandes nations sur la façon dont nous devrions le faire'.
Mais tout le monde ne partage pas cette vision des choses au Brésil. Marina Silva, candidate écologiste à la Présidentielle, souhaite plus de prudence dans les explorations et n'épargne pas ses critiques sur le peu de considération que le gouvernement Lula accorde au thème du développement durable.
D'autres voix se lèvent pour dénoncer le manque de transparence de Petrobras et de l'ANP (Agence Nationale du Pétrole) sur ces projets réalisés en eaux profondes et l'absence d'évaluations environnementales dans ces baies. Certains spécialistes affirment que le Brésil devient vulnérable et que des accidents similaires à celui de BP peuvent se produire, et qu'il n'existe pas de plan d'action concret pour remédier à d'éventuelles fuites.
* Un effondrement s'est produit au moment où la perforation atteignait la couche de sel. Une nouvelle perforation a été commencée à 375 mètres de la première.