Une passagère paraplégique de Chengdu Airlines a récemment été interdite d’embarquement. Devant ses protestations, le personnel de sécurité est intervenu, l’a faite tomber à terre et blessée. Des pratiques malheureusement un peu trop fréquentes.
La discrimination des personnes en fauteuil roulant va bon train… dans les avions
Une passagère paraplégique de Chengdu Airlines a récemment été interdite d’embarquement. Devant ses protestations, le personnel de sécurité est intervenu, l’a faite tomber à terre et blessée. Des pratiques malheureusement un peu trop fréquentes.
Zhu Lanying, 26 ans, a beaucoup voyagé en Chine, sur bien des compagnies aériennes, mais jamais elle n’avait connu une humiliation pareille. Refusée d’embarquement à l’aéroport de Kunming (Sud de la Chine) le 8 octobre 2011, elle proteste, naturellement. Le personnel de l’aéroport et de la compagnie l’écarte alors des guichets d’enregistrement et dans le tumulte, la jeune femme chute. Résultat : des plaies sur les bras et le visage. Le procès qu’elle intente à la compagnie, ne réclamant que 10 000 yuans [environ 1150 euros] de dommages, est avant tout une source d’espoir pour les handicapés chinois.
L’ONG "Initiative pour l’Équité et la Justice" (IEJ) basée à Shenzhen, a en effet récemment publié un rapport qui montre combien les personnes handicapées sont discriminées par les compagnies aériennes en Chine. Selon ce document, 22 des 24 compagnies interrogées ont reconnu avoir des règles strictes leur permettant de refuser l'accès à une personne en fauteuil roulant. Les deux compagnies restantes n’ont pas souhaité répondre.
Des motifs discutables
Les trois raisons avancées par les transporteurs pour refuser un passager sont les suivantes : si celui-ci n’a pas informé la compagnie de son état particulier lors de la réservation, s’il ne dispose pas d’un certificat médical prouvant qu’il peut voyager par avion, enfin, si la compagnie estime qu’il peut affecter négativement les autres passagers. Si les deux premières clauses sont à la limite compréhensibles, la troisième, totalement aléatoire, peut être interprétée très librement pour systématiquement refuser les personnes handicapées. Guo Bin, l’un des auteurs du rapport de l'IEJ, s’en indigne :
La clause d’inconfort sur les autres passagers dérive d’une régulation de l’administration de l’aviation civile de 1998. Ce texte donne aux compagnies aériennes le droit de refuser un passager si son comportement, son attitude ou une visible maladie mentale sont inadéquates. Mais le texte d’origine est complètement perverti par les règlements internes de ces compagnies qui sont illégaux.
Un responsable de la communication d’une compagnie concernée par cette "clause d’inconfort" tente une explication :
Nous voulons simplement fournir le meilleur service possible à tous les passagers, handicapés ou pas. Pour installer un fauteuil roulant, il nous faut souvent supprimer des sièges, ce qui doit être fait la veille, d’où l’obligation de prévenir la compagnie. D’autre part, les personnes handicapées ont besoin de plus d’attention de la part des stewards et hôtesses. On ne peut donc pas en accueillir plus de quelques-uns sur chaque vol, sinon la qualité du service aux autres passagers s’en ressent nettement.
Selon Lu Jun, un professeur d’université engagé dans la protection des droits des personnes handicapées, ces déclarations sont insensées :
Le personnel des compagnies aériennes et des aéroports qui refuse une personne en fauteuil est inexcusable. Beaucoup de passagers très agacés par le traitement discriminatoire qui leur est réservé vont devant les tribunaux, et c’est une excellente chose. Cela va obliger les compagnies à changer.
En effet un cas semblable survenu l’année dernière sur la compagnie Shenzhen Airlines a été récemment jugé. La condamnation du transporteur l’a fait évoluer et s’engager sur une promesse bienvenue : des fauteuils roulants seront mis à disposition des passagers sur chaque vol.