L’homophobie est en hausse sur tout le continent africain. Au Ghana, les déclarations fracassantes de leaders condamnant l’homosexualité ont provoqué un climat de terreur. Les homosexuels se cachent et pâtissent d’un manque de soins.
Recrudescence de l'homophobie
L’homophobie est en hausse sur tout le continent africain mais au Ghana le phénomène prend vraiment de l'ampleur. Les déclarations fracassantes de leaders condamnant l’homosexualité ont provoqué un climat de terreur. Les homosexuels se cachent. Ils ne peuvent plus se protéger des maladies sexuellement transmissibles et ont peur d'aller dans les centres de santé.
En juin dernier, les ONG de l’ouest du Ghana ont annoncé suivre près de 8.000 homosexuels. Le chiffre a choqué et les réactions ne se sont pas fait attendre : le ministre de la région, Paul Evans Aidoo, a qualifié l’homosexualité de “détestable et abominable". Il souhaite emprisonner tous les homosexuels de sa région.
D’autres leaders politiques et religieux du pays n'ont pas hésité à tenir le même genre de discours. Une recrudescence de l'homophobie que tente d'expliquer MacDarling Cobbinah, membre de la Coalition contre l’homophobie au Ghana :
Ces déclarations génèrent la terreur et stigmatisent les homosexuels. Beaucoup d’hommes ne participent plus aux programmes de lutte contre le sida. Il devient difficile d’organiser quoi que ce soit pour eux. Ils ont peur de se faire arrêter s’ils viennent. Ils se font aussi parfois passer à tabac.
Une communauté aux abois
Dans ce pays d'Afrique occidentale, les relations homosexuelles constituent une infraction et sont passibles de 6 mois de prison. Mais en dépit des appels du ministre Aidoo, il n’y aurait pas encore eu d’arrestations. Les homosexuels se sachent et durant le mois de juillet, personne n'est venu assister au groupe d'information sur le VIH de MacDarling Cobbinah. Il rassemblait habituellement plus de 20 hommes :
Les gens ne sortent plus comme avant. L’appel aux arrestations a vraiment choqué.
D’autres ONG confirment que plus personne ne vient leur demander de préservatifs ou de soins. Une d'entre elles a même reçu des pressions gouvernementales pour révéler l'identité de ses patients. Enfin, on menace de fermer les centres de prévention du sida. Or, 25% des homosexuels ghanéens étaient séropositifs en 2006. L’interruption de ces infrastructures aurait un impact sur des milliers de personnes.
Des raisons politiques
Alors même que les tensions se font ressentir, Rachel Spronk, chercheuse qui étudie la question de la sexualité eu Ghana , parle de cercle vicieux :
Un sentiment homophobe a fait surface et les politiciens pensent devoir y répondre. Les gens qui n’y avaient jamais pensé avant ont désormais tous une opinion.
Graeme Reid, membre de l'ONG Human Rights Watch, pense qu’à l’approche des élections présidentielles de 2012, certains espèrent marquer des points dans les sondages :
Il n’est pas rare d’utiliser l’homosexualité comme diversion, pour faire oublier du grand public les problèmes économiques et politiques. L’homosexualité et le colonialisme ont même été associés. On dit que ce sont les Occidentaux qui l’ont importée en Afrique.
Une pratique “non-Africaine”
Quoi qu’il en soit, l’homophobie continue à gagner du terrain en Afrique. Dès 1995, Robert Mugabe, le président controversé du Zimbabwe, avait le premier condamné l’homosexualité. Ces derniers temps, des journaux ont même appelé au meurtre en Ouganda, et en Afrique du Sud, des lesbiennes ont été violées, en guise de punition.
Un représentant du gouvernement ghanéen, Samuel Ablakwa, a déclaré que son président considérait l’homosexualité comme "étrangère à leur culture." Selon Rachel Spronk, l’utilisation d’expressions comme "non-Africain" est efficace car elles touchent à l’identité et à la culture africaine. Les gens se sentent concernés. Ce qu'illustre Fred Degbe, du Conseil chrétien du Ghana :
Nous avons des opinions fortes sur des sujets comme l’homosexualité. On ne doit pas permettre aux autres d’imposer chez nous ce qui est acceptable dans leur culture.