‘Nous sommes un peu étranges. Mais étrange d’une façon intéressante’, a déclaré Katrin Juliusdottir, Ministre de l’Industrie, de l’Énergie et du Tourisme en Islande. Après avoir été lourdement touchée par la crise en 2009, l’Islande a fait le choix d’un plan de relance économique différent du reste de l’Europe …
L’électricité la plus propre du monde
'Nous sommes un peu étranges. Mais étrange d’une façon intéressante', a déclaré Katrin Juliusdottir, Ministre de l’Industrie, de l’Énergie et du Tourisme en Islande. En effet, il n’y a peut-être qu’en Islande que le spa le plus populaire (le Blue Lagoon qui attire plus de visiteurs par an qu’il n’y a d’habitants en Islande) est situé près d’une centrale électrique qui y déverse 50 litres d’eau de mer très chaude par seconde.
Avec 318 000 habitants pour 103 000 km2 (ce qui équivaudrait à n’avoir que 224 habitants à Manhattan), l’Islande a fait le choix d’un plan de relance économique différent du reste de l’Europe après avoir été lourdement touchée par la crise en 2009. Sans surprise, l’Islande essaye d’attirer les entreprises étrangères dans l’agriculture, la technologie et les médias, en offrant de baisser les taxes.
Mais ce qui est moins habituel, c’est d’offrir de l’électricité propre. Le pays crée 100% de ses besoins en énergie grâce à l’hydro-électricité et la géothermie, et ne cache pas son désir d’un monde sans énergies fossiles pour prendre le dessus.
En plus d’être renouvelable, l’électricité islandaise est une des moins chères du monde industriel. Le gouvernement propose aussi aux investisseurs des taux garantis sur 20 ans et un réseau d’énergie sans faille, de quoi attirer l’attention dans un marché dominé par la Chine et l’Allemagne, et par exemple, l’attention d’IBM. Le bruit court que la multinationale installe en ce moment un centre d’information reliant l’Europe à l’Amérique du Nord par un réseau déjà existant de lignes en fibres optiques sous-marines. Le climat du pays permet aussi de faire des économies sur le maintien de la température dans les pièces où sont installés les ordinateurs. IBM se refuse à tout commentaire.
Une entreprise norvégienne et une autre new-yorkaise ont confirmé leur choix de l’Islande, attirées par l’électricité renouvelable.
Le problème est que la plupart des entreprises qui s’implantent polluent, même avec de l’énergie renouvelable, comme le secteur de l’aluminium, industrie majeure du pays avec la pêche. La ministre Juliusdottir exprime sa préférence pour la variété :
Ce n’est pas malin de passer d’une dépendance à l’industrie de la pêche à une dépendance à l’aluminium. Nous devons nous diversifier.
Le secteur de l’aluminium offre proportionnellement moins d’emplois que d’autres, et l’intérêt des Islandais se tourne vers la fibre optique ou le silicone, qui fournissent plus d’emploi par mégaWatt utilisé, ainsi que des emplois dérivés (recherche, pièces détachées, soutien logistique), ce que n’offre pas l’aluminium, qui travaille uniquement pour l’export.
L’Islande a aussi imaginé des 'parcs verts' où cohabitent des entreprises de secteurs variés, utilisant les sous-produits les unes des autres, comme le spa Blue Lagoon, qui utilise l’eau chaude naturelle rejetée par la centrale électrique voisine pour chauffer ses piscines. L’eau n’est aucunement gaspillée et les touristes étrangers se bousculent aux portes du spa.
Un petit problème demeure : la géothermie produit du CO2, bien qu’en moins grande quantité que les énergies fossiles. Quelques solutions existent. Le CO2 de la centrale qui alimenteBlue Lagoon est transféré vers une serre cultivant de l’orge génétiquement modifié à but médical et cosmétique. Une autre société le revend pour la fabrication d’une sorte de méthanol qui améliore l’efficacité de l’essence.
La quantité d’électricité dont dispose encore l’Islande est sujet à controverse. 75% vient de l’hydro-électricité, le reste de la géothermie, probablement aussi la ressource d’avenir, en raison de la situation volcanique du pays. Le pays est assez enclun à augmenter sa production, notamment pour pouvoir la vendre en Europe via un cable sous-marin haute tension, prévu en 2020 pour 2,6 milliards de dollars. L’idée serait de vendre l’électricité le jour et de la racheter la nuit à bas prix, et ainsi alimenter une nouvelle entreprise en attendant qu’une centrale locale soit installée.
Les atouts de l’Islande sont nombreux : entre l’Europe et l’Amérique, avec un climat facile, peu de grèves pour une main d’oeuvre qualifiée et la non-utilisation de pesticides. Si les Islandais réussissent à attirer les entreprises étrangères, ils aideront aussi à diminuer l’empreinte carbone du monde. Là encore, l’Islande fait la différence.