Alors qu’il ne reste que quelques mois avant de faire le bilan du onzième plan quinquennal, les autorités chinoises font tout pour que ses objectifs soient atteints. Notamment …
Une manière bien locale de réduire l’intensité énergétique
Alors qu’il ne reste que quelques mois avant de faire le bilan du onzième plan quinquennal, les autorités chinoises font tout pour que ses objectifs soient atteints. Notamment celui de réduction de l’intensité énergétique de 20% par rapport au niveau de 2005. Certains gouvernements locaux prennent même des mesures extrêmes, coupant l’électricité plusieurs heures sans avertir personne.
Le 3 septembre dernier, dans le district de Anping, province du Hebei, les habitants ont été surpris. Impossible d’allumer la lumière ou la télévision. C’est que l’administration a décidé de couper l’électricité pendant 22 heures. Elle avait 'prévenu' ses administrés trois jours avant, par le biais d’un règlement municipal que sans doute seuls les fonctionnaires municipaux avaient eu l’occasion de lire.
Le 9 septembre, la mairie s’est excusée officiellement, après une indignation générale reprise par les médias nationaux et une critique sévère de la Commission Nationale du Développement et de la Réforme (CNDR), organe central du pouvoir pékinois.
Pourquoi cette mesure ? 2010 est la dernière année du onzième plan quinquennal chinois. Ce plan prévoyait la réduction de la consommation énergétique par unité de PIB de 20% par rapport à 2005. Les objectifs nationaux décomposés aux niveaux provinciaux puis municipaux faisaient apparaître un manque de rigueur dans certains coins de la Chine. Le gouverneur du Hebei a alerté fin juillet les maires des communes de la province qui n’avaient pas atteint leurs objectifs que les conséquences pour l’avancement de leurs carrières seraient sévères. A Anping, on a pris la menace au sérieux : quel meilleur moyen pour réduire la consommation d’énergie que de ne pas en fournir du tout ?
Mais non seulement les conséquences sont très désagréables pour les consommateurs, mais en plus, la mesure n’est pas aussi efficace qu’on pourrait le penser. En effet, ceux qui avaient été prévenus et qui en ont les moyens ont acheté des groupes électrogènes au rendement minable. Ce sont par exemple des hôtels ou des usines. Pour les autres, c’est la galère. Monsieur Chen, qui vend des glaces près de l’hôtel de ville, n’est pas content :
Je suis obligé de traîner ma glacière jusqu’à un endroit qui a un groupe électrogène, sinon je perds tout !
Monsieur Liu est directeur d’une société qui produit du grillage, la spécialité locale (80% du grillage chinois est produit dans ce district !).
Nos clients, on les trouve par Internet, on garde le contact par Internet et on les informe de l’avancement de leurs commandes par Internet. Aujourd’hui, je ne peux pas réaliser les commandes des jours précédents ; en plus, impossible d’avertir la clientèle. Si ça dure je ne sais pas comment je vais faire.
Cette histoire a au moins le mérite de nous prouver la détermination de l’administration chinoise à réduire l’intensité énergétique du pays. Mais elle montre aussi à quel point les barons locaux de l’administration chinoise ont des habitudes féodales. Des habitudes qui ne sont pas près de changer !