Dans la lignée de la lutte contre le trafic organisé, Sao paulo met en place des mesures anti-drogue après le succès des opérations de Rio en novembre. La stratégie consistant à imposer “douleur et souffrance” aux drogués a connu une nouvelle étape samedi 7 janvier 2012. La police s’est résolue à escorter dans les rues de la ville une “procession du crack”…
Une “procession du crack” à São Paulo
Dans la lignée de la lutte contre le trafic organisé, Sao paulo met en place des mesures anti-drogue après le succès des opérations de Rio en novembre. La stratégie consistant à imposer "douleur et souffrance" aux drogués a connu une nouvelle étape samedi 7 janvier 2012.
Une semaine après avoir débuté l’occupation de la « Cracolandia » (le quartier du crack, dans le centre historique de São Paulo), la police s’est résolue à escorter dans les rues de la ville les consommateurs de crack. Une "procession du crack", avec des groupes atteignant 100 personnes, éclairée par les gyrophares des voitures de police, qui a duré de 20h à 23h. Mais le trafic continue à tourner à toute vapeur et la chaine d’approvisionnement de la drogue n'est pas coupée.
La chasse aux drogués a créé une "cracolândia itinérante" en plein cœur du centre de São Paulo. Pendant les "pauses" de leur marche imposée par la police, les groupes s’arrêtaient pour allumer les pipes à crack et se reposer. Après quelques minutes, ils reprenaient leur marche… sans destination.
Une opération sans perspective
Pendant une des pauses, une habitante du quartier a traversé la rue au milieu du groupe des dépendants et s’en est prise aux policiers afin qu’ils fassent quelque chose pour disperser "l’attroupement" formé devant son immeuble.
Même vous (les policiers), vous n’y arrivez pas. Avant, ils étaient cachés. Maintenant, plus personne n’a la paix. Il faut trouver un endroit où les amener.
Les policiers eux-mêmes doutent de l'efficacité de la "procession du crack". Pour un policier:
Tant que la drogue arrivera jusqu’ici, ce ne sera pas possible. Ca ne servira à rien. J’honore ma mission, je fais mon travail, mais je ne suis pas naïf. Il y a la corruption policière, la collaboration de commerçants, beaucoup de personnes sont impliquées, il y a beaucoup d’argent en jeu. Il faut couper le mal à la racine.
Des doutes répétés par d’autres policiers, qui ne croient plus à une issue positive et ne font que "exécuter les ordres".
Un quartier qui continue de respirer le crack
Depuis le 3 janvier 2012, 200 grammes de crack ont été saisis et 42 personnes interpellées. Les chiffres sont modestes. La quantité de drogue saisie par la police en 5 jours d’opérations est équivalente à ce qui est consommé en quelques heures. Dans tous les coins de rue, les pipes s’allument, les trafiquants fournissent la drogue.
Tout cela à 30 mètres à peine des voitures de police. Cracolandia ne vit pas une "crise d’approvisionnement ", comme l’imaginaient les autorités avant de décréter l’occupation.
L’origine du mal
Cracolandia existe parce que la ville a laissé ce quartier du centre-ville devenir une zone de non-droit. Les lois y fonctionnent différemment, fumer du crack est considéré comme normal et la cohorte de drogués ne fait plus peur aux passants. Ils préfèrent les savoir ici plutôt que dans les quartiers où ils vivent.
La ville a tourné le dos au problème et délaissé le quartier. L’éclairage public y est déficient, les rondes de police quasi inexistantes, les trottoirs détruits, le ramassage des déchets irrégulier.
Cracolandia en chiffres
2000 drogués fréquentent quotidiennement Cracolandia.
23 rues du quartier devaient être rénovées pour décembre 2011, un projet de 7 millions d’euros. Rien n’a été fait.
450 millions d’euros seraient nécessaires pour racheter les immeubles abandonnés de Cracolandia, les démolir et nettoyer la place. Un projet à l'étude depuis plusieurs années.
160 agents municipaux des services de santé parcourent quotidiennement les rues de Cracolandia.
317 lits sont mis à disposition dans des centres de traitements de la dépendance, chiffre dérisoire comparé au nombre de consommateurs.
4 euros: Le prix de la dose de crack. Une forme impure de la cocaïne, faite à base de pâte de cocaïne et de bicarbonate de soude. Il est brûlé dans des pipes et la fumée est aspirée. Il peut être aussi mélangé à des joints de marijuana. Il provoque euphorie, agitation mentale, psychose, agressivité, mais également des infections, des hallucinations et des problèmes cardiaques.
0,50 à 1 euro: Le prix de sous-produits du crack, également consommé à Cracolandia. Encore plus dévastateurs, ils sont issus de mélanges de pâte de cocaïne avec de l’alcool, de l’essence, du kérosène et même de l’eau de batteries usagées.
Pour en savoir plus, estadao.com.br / article 2