Les gouvernements du monde entier viennent de recevoir l’un des plus importants rapports scientifiques jamais écrits.
Le changement climatique étape par étape
Les gouvernements du monde entier viennent de recevoir l’un des plus importants rapports scientifiques jamais écrits. Il présente une évaluation très claire de la manière dont le climat de la planète réagit à l’augmentation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère, exposant des milliards de personnes à des événements météorologiques extrêmes et à une montée du niveau des océans.
Un projet confidentiel de ce nouveau rapport sur les causes et conséquences du réchauffement global a été soumis pour examen aux gouvernements le 7 juin, avant la publication de la version finale cet automne. Compilé pour le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) par 255 experts scientifiques d’universités et d’instituts de recherche de 38 pays, ce rapport fournit une vue d’ensemble mise à jour des conclusions de milliers d’études récentes et ayant fait l’objet d’un examen par des pairs.
Surtout, ce document du GIEC – le premier volet du 5ème Rapport d’évaluation, qui fait suite aux quatre précédents rapports publiés depuis la création du GIEC en 1988 – comprend une analyse des prévisions faites à partir de nouveaux modèles informatiques sur l’évolution du réchauffement climatique d’ici la fin du siècle. Les premiers résultats montrent qu’au niveau actuel d’émissions de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre, les températures moyennes mondiales pourraient, d’ici la fin du siècle, être d’au moins trois degrés plus élevées qu’elles ne l’étaient avant le début de la Révolution industrielle et l’utilisation généralisée des combustibles fossiles.
Lors du sommet des Nations unies de 2010, les gouvernements ont convenu que les émissions devaient être fortement réduites de façon à limiter à deux degrés l’élévation des températures à la fin du siècle. Il est donc probable que ce dernier rapport du GIEC augmente les pressions exercées sur les chefs d’État et de gouvernement en amont du prochain sommet de l’ONU de 2015 qui doit conclure un nouveau traité international sur le changement climatique, dont des objectifs contraignants de réduction d’émissions de gaz à effet de serre.
Parmi les principaux point abordés par les dernières recherches – synthétisés dans le rapport du GIEC – figurent les tendances actuelles de concentration des gaz à effet de serre et les températures mondiales. Les revues scientifiques indiquent que la concentration de CO2 dans l’atmosphère est 40 pour cent plus importante qu’elle ne l’était avant l’ère industrielle, soit à son plus haut niveau depuis le Pliocène il y a environ 3 millions d'années, quand la température globale était deux à trois degrés plus élevée qu'à l'ère pré-industrielle, avec des calottes polaires plus petites et un niveau des mers environ 20 mètres plus haut qu'aujourd'hui.
Depuis lors, la température mondiale moyenne à la surface du globe a augmenté de près de 0,8 degré Celsius. Si cette augmentation a été moins rapide ces quinze dernières années qu’elle ne l’était précédemment, tous les climatologues pensent que ce ralentissement est temporaire et que le réchauffement repartira de plus belle dans un avenir proche.
Les gouvernements s’apprêtent à négocier ligne par ligne un résumé de la première partie du 5ème Rapport lors d’une réunion spéciale à Stockholm fin septembre. Cette partie du rapport sera publiée dans son intégralité peu après. Les deux autres parties – sur l'adaptation aux effets du changement climatique et sur les moyens d’atténuer les pires conséquences potentielles en réduisant les émissions de gaz à effet de serre – seront, quant à elles, adoptées au printemps 2014. Avec une synthèse des principales conclusions, ces trois volets constituent le 5ème Rapport d’évaluation.
Le GIEC, créé par l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), a fourni aux responsables politiques des informations qui font autorité sur l’état des connaissances concernant le changement climatique depuis 1988. Son précédent Rapport d’évaluation, publié en 2007, concluait que le réchauffement mondial au cours des cinquante dernières années était sans équivoque, et qu’il était à 90 pour cent certain qu’il était lié à l’activité humaine, notamment par le recours massif aux énergies fossiles.
Mais le GIEC a également fait l’objet de critiques après avoir admis en 2010 qu’un document sur les conséquences du changement climatique affirmait à tort qu’au taux de fonte actuel, tous les glaciers de l’Himalaya auraient disparu en 2035, au lieu d’une échéance de plusieurs siècles.
Cette erreur ponctuelle, mais importante, a incité le GIEC à demander aux principales académies des sciences mondiales de vérifier ses propres procédures de validation scientifique.
A la suite des recommandations émises par les académies, le GIEC a adopté des méthodes d’examen plus rigoureuses et un processus permettant de corriger les erreurs éventuelles dans les rapports subséquents et appliqué une politique plus explicite pour traiter les conflits d’intérêt potentiels entre les auteurs.
Les détracteurs du GIEC ont tenté, sans succès, de saper son dernier rapport en publiant des fuites de documents provisoires. Ils ont cité des éléments de ces brouillons hors de leur contexte de façon à donner une impression trompeuse de leur contenu, par exemple en affirmant à tort que les recherches démontrent que les rayons cosmiques sont responsables du réchauffement climatique.
Il n’en reste pas moins que les gouvernements et l’opinion publique peuvent être assurés que le rapport du GIEC est l’évaluation scientifique la plus fiable du changement climatique jamais produite. De manière plus fondamentale, il permettra aux gens de lire par eux-mêmes le verdict autorisé de la communauté scientifique sur les preuves du changement climatique. Les citoyens pourront alors juger de l’efficacité des efforts visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre – et décider si leurs gouvernements font tout ce qu’il faut pour gérer les risques posés par le changement climatique.
Bob Ward
Traduit de l’anglais par Julia Gallin